Au vu de cette participation, nous avons prévu 3 groupes de travail, de quoi occuper tout ce petit monde. Mais pour commencer, nous déployons 2 grandes bâches plastiques au-dessus de l'entrée, histoire de rester un peu au sec pour cette journée placée sous le signe de la pluie.

Le premier groupe, le principal, va s'occuper de ressortir les cailloux, en fait la fin du bouchon qui obstruait le puits jusqu'alors. Le treuil étant à nouveau en service, autant profiter au maximum de cette… manne mécanique ! Néanmoins, nous n'allons pas tout ressortir, juste ce qu'il faut pour que les rochers qui restent soient correctement immobilisés. Pour ceux qui remplissent le tonneau, la tâche devient rapidement fastidieuse ; les sédiments sont devenus très collants. Ils travaillent bien sûr assurés avec une corde, le puits se poursuit quand même une dizaine de mètres en dessous du niveau où ils se tiennent !

Dans le second groupe, 3 personnes se consacrent à poser une barrière autour de l'entrée. A l'origine, si un animal ou un promeneur venait à tomber dans la doline d'entrée, ce n'était pas forcément dramatique puisque la cavité était bouchée à peine quelques mètres en dessous. Aujourd'hui, avec les travaux accomplis depuis 2 ans, celui qui tombe dans le trou a de fortes chances… de finir sa course… 30 mètres plus bas !!! En conséquence, nous avons pris la décision de clôturer l'entrée, sait-on jamais… Pour 4 des 5 piquets métalliques que nous allons utiliser, il a suffit de forer de gros trous à même la roche. En revanche, le dernier a nécessité un gros trou dans l'éboulis de surface, qui ensuite a été rempli de béton. Un fil de fer sur 2 niveaux viendra encore compléter l'ensemble, alors dorénavant… pour toutes les bêtes et autres curieux :

- plus d'excuses… le territoire des spéléologues est signalé !

Pour le dernier groupe, nous avons prévu d'agrandir l'étroiture terminale, étant donné qu'elle s'avère plus sévère que ce que nous avons aperçu la première fois. Pour commencer, c'est Joël et Patrick qui décident de s'y attaquer, avec la technique dite : du "tic-boum". Cette méthode consiste à percer un petit trou dans lequel on introduit une à deux cartouches prévues à l'origine pour les pistolets à clous. A l'aide d'une tige métallique faisant office de percuteur, l'explosion des cartouches va pulvériser la roche autour du trou. Ce procédé bien qu'efficace, comporte néanmoins de réels dangers, notamment au niveau des projections de roche et résidus de cartouche en fusion. Fort de son expérience dans ce domaine, Joël maîtrise bien cette formule, qui lui a déjà permis de franchir bon nombre de passages étroits. Ici, le travail est rendu d'autant plus délicat à cause de la présence d'argile, qui rapidement nous recouvre des pieds à la tête... Après plus 2 heures à l'ouvrage, nos 2 percuteurs ont réussit à agrandir l'orifice qui maintenant est devenu pénétrable, mais sans plus. De l'endroit où ils se tiennent, ils n'arrivent pas à distinguer ce qu'il y a au-dessous. Leur corde d'assurage est amarrée bien en retrait, ce serait hasardeux de descendre plus bas dans ces conditions. De toute façon, l'heure du repas de midi est déjà bien engagée, c'est le moment de ressortir pour préparer les grillades !

Pendant le repas les commentaires vont bon train ; nous nous imaginons déjà dans le réseau des Fées, en train de déboucher dans la Salle du Col, dont le plafond a été mesuré à plus de 45 mètres. En fait, si jonction il y a, nous n'avons aucune idée de l'endroit où nous parviendrons dans le réseau. Cependant, puisque cette fameuse Salle du Col serait l'endroit rêvé pour tous ceux qui l'on vue, c'est indéniablement à quoi nous nous plaisons à croire…

Vers 14 heures, c'est la reprise du travail. La premier groupe a maintenant terminé le nettoyage des blocs dans le puits, mais pour les autres, il y a encore bien de quoi faire. Dans l'étroiture terminale, c'est au tour de Claudal et Pierre de prendre le relais, accompagné de Bertrand et Marc. Pour commencer, nous plaçons 3 nouveaux ancrages afin de placer correctement la corde pour aller voir de plus près ce qui reste de l'étroiture, et ainsi décider de la suite des opérations. Arrivé dans le passage, je vois que la corde frotte un peu sur le plancher argileux, mais rien de bien inquiétant. En descendant encore d'un mètre, je me retrouve cette fois sous le rétrécissement. Là, attiré comme un aimant, je ne peux m'empêcher de regarder contre le bas… …

Je suis déconcerté !!!...

Le puits doit faire une vingtaine de mètres, mais le volume est vraiment énorme en rapport au puits d'entrée, déjà de bonne taille. La section doit dépasser les cinq mètres dans la largeur, tandis que c'est peut-être le triple dans le sens longitudinal… Au-delà, la portée de mon éclairage me donne l'impression qu'une galerie haute se poursuit, mais c'est peut-être aussi l'orée d'une salle. Mais pour le moment, j'en ai déjà assez vu comme ça, je dois me centrer plutôt sur l'étroiture, la raison pour laquelle nous sommes là ! Cette dernière n'est pas autrement restreinte, elle oblige toutefois à se frotter contre les parois recouvertes de glaise. A l'origine, le passage devait être bien plus grand, mais avec le temps l'eau très chargée en carbonate de calcium a déposé son épais manteau de calcite, rebouchant petit à petit le passage. L'équipe des percuteurs a déjà bien entamé cette couche, nous allons terminer le travail en utilisant les techniques de minage, que nous maîtrisons parfaitement. En plus de 4 heures, les explosifs, masse et barre à mine feront bon ménage pour venir à bout de ce goulet. Il est 19 heures lorsque nous sortons de la cavité, la plupart on déjà plié bagages afin de rejoindre leur petit nid douillet.

Pour l'étape suivante, un peu comme une pièce montée que les invités attendent de croquer impatiemment, nous aurons bientôt l'honneur de goûter au morceau de choix, le meilleur qui est placé au plus haut de l'édifice, dont seuls les heureux élus pourront l'apprécier : il s'agit bien sûr de la première… Jusque là, saurons-nous résister à la tentation de rêver à ce paradis souterrain, peuplé de découvertes aussi folles qu'inattendues ?...