Partis à 7h de Genève, nous voyageons complètement frigorifiés car le chauffage de la Kangoo est bloqué sur « ours polaire »… Arrivé à Vallorbe vers 8h15 nous avons l’heureuse surprise de voir qu’il n’y a pas trop de neige sur la route d’accès, on tente donc la route forestière avec les chaines ! A 50m du parking habituel… nous sommes bloqués, le châssis posé sur 30 cm de neige et les roues n’ont plus prise. Nous pellons sous la voiture un moment, puis un habitant du coin, en 4X4, viens à notre secours, non sans nous faire remarquer qu’on est un peu limite et qu’on l’empêche de passer. Pour finir tout s’arrange, nous ne sommes pas des promeneurs du dimanche en baskets et il nous remorque jusqu’à une zone moins enneigé, merci ! Il reste sans voix quand nous lui annonçons que nous n’allons pas ressortir de la grotte avant le milieu de la nuit et qu’il ne devra pas s’inquiéter si notre voiture est toujours là lors de son retour.

Après le courte marche d’approche, l’entrée du trou est vite dégagée et les puits rapidement descendus, sans encombre, malgré le poids et la grosse taille de kits. Nous sommes deux et transportons tous le matos standard pour une expé topo d’une quinzaine d’heure, plus les combi étanches pour la galerie des Lacs, la perfo pour la pose des marches, les marches, une spiterie complète avec une dizaine d’amarrages ainsi qu’une corde que nous récupérerons au début de la galerie des Epées.… A l’allé Ludo dira : C’est cool les kits sherpa ça passe partout, c’est un bon test pour des sorties bivouac ! Au retour il dira : P… de Kit de M…. qui coince dans les étroitures.

Bref, arrivé au vestiaire de la galerie des Epées, avant les lacs, nous enfilons les sous combi étanches et embarquons chacun une grosse bouée. Premier lac, second, puis gros bouillon de bulle sous les fesses de Denis… qué passa ? Yé pété ? Il est loin de tout rocher et ne bouge que ses p’tites mains pour avancer ! Ca n’est pas une crevaison, mais la connexion de valve sur la chambre à air. Ca bulle trop pour continuer ainsi, et Denis retourne changer d’embarcation, aie ça va pas faire plaisir à Pierre ce coup-là. Bon en contrepartie, le dispositif de regonflage des bouées est prêt et lors d’une prochaine sortie, on tentera de réparer deux des grosses bouées encore sur place. En l’attendant, Ludo fait des allers-retours sur son embarcation avec les sacs, histoire de ne pas perdre trop de temps.

Après cette mésaventure nous arrivons à la remontée Baudegamu et l’installation des marches commence immédiatement. Nous plaçons 12 marches en fer à béton de diamètre 10 dans des trous de 12X100mm inclinés pour que la marche en pénétrant se déforme et reste bien ancrée. L’échelle spéléo d’origine est lovée en haut et les amarrages de la corde en place doublés. Pendant que l’un travail, l’autre se ravitaille et inversement. Après un peu moins d’une heure, mais sans montre c’est une estimation, satisfait de notre travail, nous nous engageons dans la suite de la galerie Guenièvre, et complétons l’équipement qui avait été réalisé lors d’une précédente sortie. Arrivé au terminus topo nous reprenons l’explo et bien entendu la topo!

On début par la descente d’un petit puits, son grand frère, non descendu, est situé juste à côté. Au plafond, de très grosses cheminées d’où ruisselle un petit peu d’eau sont observées. De possibles futurs accès ? En bas du petit puits, nous remontons sur un dôme de calcite blanche puis derrière un nouveau petit ressaut bloque le passage. Pendant que Denis se charge de l’équipement, Ludo dessine. En bas du ressaut, un bassin puis une pente raide de calcite polie par les écoulements d’eau. Plusieurs jolies petites stalactites et stalagmites ponctuent la progression.

Après une quarantaine de mètres nous recoupons de nouveau une cheminée d’une vingtaine de mètres. Devant nous un dôme de calcite remonte très proche de la voute de la galerie et un rideau de stalagmite semble bloquer le chemin. On peut se faufiler à quatre pattes entre les concrétions pendant une quarantaine de mètres et alors le sol commence à redescendre, la galerie prend de l’ampleur. Il y a de plus en plus de concrétions, de gours, de coulées de calcite. On arrive dans une magnifique petite salle que nous surnommerons la « Forêt Enchantée ». Il y a de nombreux petits gours concrétionnés, une rivière de calcite blanche et surtout une forêt de stalagmite de 4 à 5 mètres de hauteur. Tout est propre et immaculé. C’est ‘euphorie. Il faudra absolument baliser le passage avant qu’il n’y ait trop de casse. Pas de photo car comme dit plus haut, devant le volume et le poids de nos sac nous avons dû faire l’impasse sur une partie du matériel, mais ça n’est que partie remise.

Nous profitons de ce cadre idyllique pour faire une petite pause et boire un thé chaud. La suite de la galerie prend un angle à 90° et débute par un lac au plafond assez bas qui débouche sur une galerie d’une cinquantaine de mètres au sol boueux. Il n’y a presque plus de concrétions. Au bout, le plafond est bas, moins d’un mètre, et deux galeries s’offrent à nous. Sur la droite, c’est un cul de sac très concrétionné mais boueux. A gauche, nouveau changement de direction à 90°. On repart en direction du sud-est. Après 10 mètres, mince, un ressaut. On hésite, discute puis en passant sous un bloc négocions l’obstacle sans danger.

Nous buttons de nouveau sur un petit lac, puis une fois de plus la pente remonte et on débouche dans une très grosse galerie en trou de serrure. C’est dantesque ! On reste dans l’aval, l’amont étant difficilement accessible et continuons notre progression. La galerie est de plus en plus méandriforme avec des belles coulées de calcite sur la paroi de gauche. Nous terminons notre exploration après 360 mètres de topographie dans une très grosse section propre et n’avançons pas d’un millimètre de plus, seul le faisceau de nos lampe se permet encore un bout de pointe, la galerie continuant tout droit à perte d’éclairage. C’est dur mais quel bonheur de savoir où l’on va continuer notre prochaine explo ! A noter qu’un léger courant d’air venait contre nous tout au long de cette nouvelle galerie.

Il est maintenant temps de ressortir. A 1h du matin et après 15 heures d’explo nous retrouvons les sapins, la neige et l’ambiance hivernale. Waouh on s’est régalé ! On se change rapidement et avalons les kilomètres jusqu’à nos maisons. Le plus dur dans la sortie fut sans aucun doute le retour sans chauffage dans la voiture de Denis.

Denis Favre & Ludovic Savoy,