Il est probable que l'eau ne vient pas des environs immédiats et qu'il faut ainsi plus de temps pour que le débit varie. Malgré les 3 tuyaux de 45, 75 et 100 mm de diamètre que nous avons récemment mis en place pour vider le siphon, la quantité d'eau qui en sort, bien qu'importante, est équivalent au débit naturel. Le système de vidange automatique que nous avons confectionné a l'avantage d'empêcher les tuyaux de se désamorcer lorsque le niveau du siphon atteint la hauteur voulue, en revanche la pression dans les canalisations est beaucoup moins importante que pour un siphonage ordinaire. En conséquence, puisque nous désirons quand même savoir ce qui se cache derrière ce passage noyé qui nous nargue depuis si longtemps, nous installons les tuyaux de manière classique, avec un écoulement vertical sans aucune retenue. Le changement de débit est radical, d'ailleurs le niveau du lac baisse maintenant à vue d'œil !

En attendant, nous faisons un peu d'ordre dans l'enchevêtrement de cylindres de diverses longueurs, le dernier apporté ayant été placé précipitamment !... Pour l'heure, l'abaissement du lac laisse apparaître quelques lames de rocher entravant le passage, que nous nous empressons de supprimer avec quelques coups de masse improvisée par un gros galet ! Une heure et demie plus tard, le lac a baissé de 70 centimètres, mais le siphon est toujours amorcé. Une brève immersion indique que le conduit n'est plus immergé que sur un mètre à peine, donc nous décidons de le franchir en apnée. Je passe le premier avec une corde, qui sera ensuite utile pour se tirer. Le point bas du siphon fait juste 50 centimètres de haut, mais c'est amplement suffisant pour passer sans difficulté. Quelques instants plus tard Bertrand me rejoint, qui n'a pas l'air autrement impressionné pour sa première apnée souterraine… Cela fait 3 mois qu'il a commencé la spéléo, c'est dire qu'à 50 ans ce n'est jamais trop tard pour assouvir pleinement notre passion dans ses moindres facettes …

De l'autre côté du siphon nous sommes à peine debout avec de l'eau jusqu'aux genoux. Une petite galerie semi inondée se poursuit, aux parois bien déchiquetées. Nous nous attendions à quelque chose de plus grand, tant pis pour les détails ! Quelques fossiles agrémentent les parois, les mêmes que dans la galerie des Fossiles située à quelques enjambées. Quelques mètres plus loin le plafond plonge brusquement dans l'univers liquide, et sonne le glas brutal de la fin des réjouissances ! Une nouvelle immersion indique que le siphon est certes beaucoup plus spacieux que le premier, en revanche plus étendu aussi ; je ne distingue aucune surface à perte de vue de l'éclairage de plongée. Cet endroit est à revoir lorsque le débit de la rivière aura diminué, ou alors avec un plongeur. Il est peut-être aussi envisageable de vider ce nouveau siphon, il faudra dans ce cas rallonger nos tuyaux de quelques mètres. Avec dix petits mètres de première, c'est un mince résultat en repensant aux efforts investis dans le transport et la mise en place des tuyaux. Néanmoins, c'est une pierre de plus à ajouter sur la pyramide de la connaissance du réseau, où l'on est encore bien loin d'en voire le sommet…