Nous avons décidé de décaler l'horaire de départ. Au lieu de 7h à Vallorbe ça sera 7h à Genève. Aujourd'hui, Philippe Marti (Alf pour les intimes) qui n'a plus fait de spéléo depuis 1 an, a décidé de nous accompagner pour la sortie. Il connait bien les Fées car avait fait quelques sorties avec Pierre il y a de cela bien des années maintenant. C'est dans son 4x4 que nous nous rendrons à Vallorbe avec l'espoir secret de pouvoir continuer un bout la route d'accès aux Follatons et ne pas se retrouver planté comme la dernière fois. Arrivés sur place, nous ne tenterons même pas. Un bon 50 cm de neige recouvre le chemin. Nous chaussons nos raquettes en hésitants entre se changer à l'entrée ou au parking. Pour ma part je ferai l'approche en sous combi et Denis et Alf en habits de montagne.

Arrivés à l'entrée, il y a un beau paquet de neige qu’une bonne dizaine de minutes de pelletage suffiront à dégager. Nous nous équipons et pénétrons dans le gouffre à 10heures du matin. Une fois de plus, nous sommes lourdement chargés. Denis à une corde de 30 mètres pour l'équipement d'une potentielle jonction avec la galerie des Pharaons et Philippe un seconde corde pour équiper les petits ressauts qui parcourent la progression dans la galerie Guenièvre. Pour ma part c'est le matos topo et le matos photo. Avec la combi étanche c'est une fois de plus un kit sherpa que je me coltinerai pour la sortie. Il faut dire que l’arrêt topo de la dernière sortie nous laisse présager un beau bouclage pour autant que nous ayons le temps de faire suffisamment de topo.

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Les puits sont rapidement dévalés et nous arrivons au vestiaire de la galerie des Epées pour enfiler les combinaisons étanches. Tout au long de la progression, nous avons constaté pas mal de chamboulements suite à la crue du 2 février. Au bas du puits de la Peur, nos bouteilles de boissons que nous avions laissées lors des précédentes sorties ont été embarquées par la crue jusqu'au Mouille Cravate! Mise en charge complète du réseau ou ruisseau en furie? Les bouteilles ne sont pas trop cabossées donc on opte pour la mise en charge… ça fait froid dans le dos. Arrivés au méandre Pinpin, les vaques sont vides, les galeries purgées, plus de graviers au fond. Je commence à me faire du souci pour les bouées. Mais c'est le soulagement en arrivant à la zone de stockage, tout est en place et en bon état. Denis en profite pour réparer l'une des chambres à air avec la cyanolite. Essai transformé, ça à l'air de fonctionner. Nous regonflerons à la prochaine sortie car nous n'avons pas pu embarquer la bouteille de plongée, les kits étant pleins. Après une petite demi-heure nous continuons la progression en direction de la galerie des Lacs et de Guenièvre.


En arrivant à la remontée de Baudegamu, on constate pour la seconde fois que la corde a été embarquée dans la faille par la montée des eaux. Nos marches n'ont pas bougé. Encore un petit moment de progression et nous arrivons dans la galerie Guenièvre. L'extrémité des cordes posées lors de la dernière sortie sont toutes tonchées. Décidément il ne doit pas faire beau se retrouver coincé dans le trou en crue. On est tous assez d'accord que c'est la mort assurée! Au début des galeries concrétionnées, nous commençons le balisage de la progression. On choisit le chemin le plus évident, et commençons à dérouler le fil. Pour une fois ça n'est pas en siphon. Alf et complètement baba, ça lui rappelle le Yucatan! Arrivé au bout de la ficelle, on débouche après quelques démêlage de cordelette à l'entrée de la Forêt Enchantée et en profitons pour faire une série de photo.

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Le temps avance et nous faisons notre première pause casse-croute avant de continuer en direction du terminus topo. Vers 15h00 nous sommes à pied d'œuvre. Je déballe le matos topo et prépare le tout. J'allume le PDA et là… catastrophe ! Panne du Bluetooth. Décidément l'informatique quand ça décide de faire ch… c'est toujours quand il ne faut pas. On reset l'appareil, enlevons la batterie, relançons le système, testons pleins de trucs mais impossible de faire fonctionner le système. Finalement on se rabat sur une métode intermédiaire, je suis au Distox, je dicte les valeurs à Denis qui les rentre dans le PDA et Alf est aux points de mesure. La crue nous a également joué des tours car nous n'avons pas retrouvé la peinture pour matérialiser les points de jonction de galeries. Ce seront donc des amorces de trous de spits qui s'en chargeront. Après ces 2-3 soucis, l'explo peut commencer. Nous poursuivons donc la grande galerie de la dernière fois, direction les Pharaons. Celle-ci continu sur une vingtaine de mètres et là patatra, on se retrouve devant un brusque virage sur la gauche à plus de 90° la galerie part en direction du Nord Est alors que les Pharaons sont au Sud Est. Une jonction avec la zone du siphon des Présidents redevient envisageable. Nous allons peut-être jonctionner dans la zone entre les extrêmes avals de Pendragon et l’amont du siphon. Serait-ce d’ailleurs la même rivière qui coule dans ces deux galeries ? Les prochaines expés nous en diront plus. Dans le virage, au plafond, on distingue une grosse galerie qui continu tout droit le long de la faille, en direction du Sud Est. C'est pour moi la suite de la galerie. Plusieurs pertes avec de gros galets de calcaires gris clairs sont au sol. Un nouveau nœud du réseau qu'il faudra investiguer lors d'une prochaine expé, la jonction avec les Pharaons reste d’actualité.


Nous décidons de continuer dans la branche la pluie évidente. La galerie se présente sous la forme d'un joli canyon. Il y a très peu de remplissages, et nous progressons directement sur la roche recouverte d'une fine pellicule de limons. Nous avançons dans de grosses marmites recoupées les unes les autres et la progression est assez monotone. Par deux fois la galerie se dédouble et de petits bouclages d'une vingtaine de mètres sont topographiés. La méthode de topo n'est pas aussi rapide qu'avec la connexion Bluetooth entre le distoX et le PDA et nous perdons pas mal de temps à dicter toutes les données, mais nous avançons tout de même bien. Nous faisons une pause après le second bouclage, histoire de faire un peu de thé, de la soupe et se restaurer. On fait encore une trentaine de mètres de topo après notre pause et arrêtons l'explo sur un carrefour de 3 galeries. Les deux dans l'axe de notre progression constituent certainement un troisième bouclage, le disto indique une trentaine de mètres. Sur la droite, un départ qui se rétréci mais qui faudra explorer lors d'une prochaine explo. Nous constatons que maintenant le courant d’air est entrant. Il y a donc forcément un endroit dans Guenièvre où le courant d’air s’inverse. Peut-être le départ en direction des Pharaons, ou bien un départ en liaison avec la Baume du Crépuscule ? L’avenir nous le dira peut-être.

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Il est maintenant 21h30 et nous décidons de faire demi-tour, afin de ne pas ressortir au petit jour. Il nous faut maintenant pas moins de 45 minutes de progression pour rejoindre les bouées à la galerie des Lacs. Que de chemin parcouru depuis le début de l'année. Denis et Alf, qui ont eu la bonne idée de laisser les bouées dans l'eau constatent que finalement il valait mieux faire comme moi et les remonter sur la berge. En effet celles-ci ont décidé de retraverser le lac. Je suis bon pour un petit aller-retour afin de leur éviter une nage forcée. On progresse tranquillement dans ces superbes lacs. Le débit de la rivière Lancelot est assez faible et la zone de courant facilement franchie. Au fur et à mesure de la progression je commence à avoir du souci pour ma combi étanche qui prend de plus en plus l'eau. L'aurais-je déchirée? Bref à la fin de la galerie des lacs je suis fin trempé mais en arrivant à la galerie des Epées, je suis vite rassuré et constate que ce coup-ci c’est moi qui ai eu une bonne idée. J'avais totalement oublié de refermé ma combi après la dernière pause. Un oubli stupide, d'autant plus que je commence à me demander comment ça va bien pouvoir se passer dehors étant donné que je n'ai pas d'habits de rechange avant la voiture.

On réattaque la montée. La galerie du Graal est vraiment toujours aussi chiante avec un sherpa. Au bas du puits de la peur ont mets tous nos pantins et c'est Denis qui part en tête, je le suis et Alf ferme la marche. Le courant d'air est déjà bien présent et bien entendu glacial. Je me rends compte que les gants en tissu enduits ne sont également pas la bonne solution pour les hivernales dans ce trou. Pour couronner le tout, je finis de me tremper les jambes dans Blanche Glaise et les Sept Gouilles. Mais bon, on a fait une bonne explo, la suite et hyper prometteuse et je suis encore en pleine forme. Que demander de plus. On enchaine les puits tranquillement et rejoignons tous la surface vers 2h00 du matin. Il neige toujours et la température doit allègrement approcher les -10. J’enfile une polaire et ma doudoune par-dessus la sous combi trempe et finalement ça n’est pas si mal que ça. C'est surtout Alf qui aura un peu plus de peine avec les pieds. On chausse les raquettes et rejoignons la voiture dans une ambiance féérique.

Décidément les hivernales c'est quand même sympa.

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A 4h15 je suis à la maison. On ne reparle même pas de se faire un plat de pâtes et un bouteille de rouge et tout le monde regagner ses pénates avec une petite pensée pour Denis qui devra récupérer de la sortie durant une semaine en Mer Rouge. Trop dur!

Ludo